Monday, June 17, 2024

Trois inscriptions chrétiennes

 


 Sous le règne de Théodose (379 - 395 AD), les anciens cultes ayant été interdits au bénéfice du seul Christiansime, érigé en religion d'État, le grand temple damascain vit s'interrompre le culte millénaire de l'antique Jupiter - Hadad. Comme ce fut le cas à Palmyre et dans de nombreuses autres localités, la cella fut certainement affectée au culte chrétienJean Malalas, qui écrivait au sixième siècle, tout comme la Chronique pascale, d'un siècle postérieur, disent simplement, sans autre précision, que Théodose transforma le temple de Damas en église chrétienne. C'est probablement vers cette époque que fut gravée, en grec, sur l'architrave de la grande baie centrale de la porte sud, l'inscription tirée des Psaumes que l'on peut encore lire aujourd'hui: "Ta royauté, Ô Christ, est une royauté de tous les siècles, et ta domination s'étend de génération en génération" (Psaume 145:13). Le linteau de la baie latérale gauche portrait l'inscription: "Dieu est terrible dans la grande assemblée des saints, Il est redoutable pour tous ceux qui l'entourent" (Psaume 89:7). (*).

Le linteau de la baie latérale droite porte l'inscription fragmentaire: "L'aigle a orné son trône; son règne..." (**). La prétendue inscription grecque mentionnant une restauration de l'église Saint-Jean-Baptiste sous le règne d'Arcadius (395 - 408 AD) et dont le prêtre melkite ʾAnṭūn Būlād aurait transmis une traduction arabe au missionnaire irlandais Josias Leslie Porter est à l'évidence controuvée, la consécration de l'église à saint Jean-Baptiste étant certainement beaucoup plus tardive, de peu antérieure à la conquête musulmane. 

Comme les architraves du centre et de l'ouest portent une invocation au Christ et au Père, on pouvait conjecturer que sur la troisième baie, celle du côté est, on avait gravé une texte mentionnant le Saint-Esprit.  

L'esplanade extérieure du temple n'ayant plus sa raison d'être, les "païens" étant désormais pourchassés et leurs rites de circumambulation bannis, elle fut progressivement urbanisée. Afin de protéger les accès à l'église, des portiques à colonnades joignirent les portes du péribole à leurs homologues de l'enceinte extérieure. À l'ouest et au nord, ces colonnades typiquement byzantines avec archivoltes et impostes en tronc de pyramide renversé sont en grande partie préservées, alors qu'à l'est, seul un fragment de colonne a été retrouvé, intégré au mur d'une maison.    








(*) Il s'agit, selon Mouterde, du Psaume 89-8: "Tu as éloigné de moi mes amis, Tu m'as rendu pour eux un objet d'horreur; Je suis enfermé et je ne puis sortir".       
 (**) D'après Mouterde (en 1925): Comme les architraves du centre et de l'ouest portent une invocation au Christ et au Père, on pouvait conjecturer que sur la troisième baie, celle du côté est, on avait gravé un texte mentionnant le Saint-Esprit. Malheureusement, cette ouverture, murée depuis des siècles comme la porte centrale, était masquée par les masures accrochées à l'enceinte de la mosquée. Elle vient d'être dégagée par les travaux qui donnent de l'air au vieil édifice, et M. de Lorey a pu faire estamper l'inscription qui la surmonte. Les treize dernières lettres sont encore visibles, les autres sont cachées à nouveau par les boutiques. Le texte compte aujourd'hui 32 lettres, grêles et très allongées, analogues aux caractères des deux inscriptions gravées sur les linteaux du centre et de l'Ouest; elles peuvent remonter au règne de Théodose, mais aussi être plus récentes. La première phrase présente, au lieu de l'invocation attendue au Saint-Esprit, une allusion au nom donné couramment alors à cette partie du sanctuaire « l'aigle », c'est-à-dire « le fronton ». il ne fait point partie d'une citation scripturaire, mais d'un texte composé librement; au lieu de lire quelque verset des psaumes, comme sur les autres baies de la porte triomphale, nous trouvons ici un résumé, en trois mots, du grand tableau de l'Apocalypse, où saint Jean contemple le trône divin porté par les quatre animaux symboliques du prophète Ezéchiel





Gérard Degeorge. La grande mosquée des Omeyyades à Damas.‎ Actes Sud 2010 (p. 49-50).

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