Le décor de la partie centrale (la façade extérieure de Qasr el-Heir el-Gharbi) comprenait des bas-reliefs figurés. Fort remarquables sont les fragments d'une figure de souverain, approximativement de grandeur naturelle, assise de face, les genoux écartés et les pieds joints. La tête, qui est partiellement conservée, porte une couronne, faite, semble-t-il, d'une sorte de calotte plate, bordée à la base d'un cerceau métallique, sur lequel est placée une paire d'ailes flanquant un cabochon central. L'absence de toute indication de plis sur la calotte paraît indiquer qu'elle ne consistait pas en une pièce d'étoffe; elle pouvait être de feutre ou de métal. On ne saurait décider si le cerceau, avec les ornements qu'il porte, était attaché à la calotte, ou formait un diadème séparé. Les parties conservées du sommet de la couronne montrent la trace d'une exposition prolongée à la pluie, et il paraît certain qu'aucun élément supplémentaire ne se superposait à ceux qui viennent d'être décrits. Sous la couronne passe la chevelure. Elle est coupée en frange de part et d'autre du front, et tombe en lourde masse derrière l'oreille, à laquelle s'accroche une grosse boucle. Le visage, mutilé, est encadré d'une barbe en collier. Le nez et l'arcade sourcilière se détachent en fort relief. L'œil, au contraire, n'est indiqué que par de la couleur. Le costume consiste en une tunique et un pantalon. La tunique, qui dégage largement le cou, possède des manches, et est ornée de galons de perles dont l'un, placé sur le devant, s'arrêtait probablement à la ceinture, tandis qu'un autre borde le bas du vêtement, lequel forme une sorte de tablier recouvrant le haut du pantalon. Ce dernier, pour autant qu'il est visible, paraît très ample; la couture en est masquée par un galon de perles. Les rosettes qui se voient sur les genoux n'appartiennent sans doute pas au pantalon, mais plutôt à la tunique. Elles ne forment peut-être, avec les galons unis auxquels elles semblent attachées, qu'un ornement du pan de ce vêtement. Mais il se peut aussi que ces galons soient des courroies, et qu'ils aient pour objet de relever la tunique sur les hanches. Il est assez probable que la figure royale occupait le tympan de l'arc ovale.
l'attitude de cette figure est celle même où plusieurs monuments représentent le souverain sassanide; le costume, avec ses amples pantalons, sa tunique si particulière, ses galons de perles, copie un costume sassanide; le visage rappelle celui de Chosroès II par des détails tels que la barbe en collier, et la frange de cheveux sur le front; la couronne enfin est sassanide par ses éléments. Me souvenant que nous possédons, dans la célèbre fresque des «ennemis de l'Islam » au moins une représentation omeyyade d'un souverain sassanide, je me suis demandé d'abord si notre personnage pouvait avoir fait partie d'un ensemble figurant quelque thème analogue. Mais son attitude trônante n'est guère favorable à une telle hypothèse; et surtout sa couronne n'est la reproduction d'aucune couronne sassanide connue; en revanche, elle est identique à une couronne que nous conserve un graffite de Mchatta. Cette couronne doit être le tadj califien, que l'on tenait jusqu'ici pour une innovation des Abbasides, aucun exemple antérieur à cette dynastie n'en étant connu; et le personnage qui le porte ne peut être que quelque Omeyyade, vraisemblablement Hichâm lui-même. Que l'apparence extérieure d'un calife syrien ait pu se modeler à ce point sur celle des rois sassanides ne doit pas surprendre: Masoudi nous a conservé le souvenir d'un manuscrit qui contenait la série complète des portraits de tous ces rois, et qui avait été copié et traduit du perse en arabe, précisément pour Hichâm.
Daniel Schlumberger. Les fouilles de Qasr el-Heir el-Gharbi (1936-38), rapport préliminaire (antiquités syriennes)
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