Faut-il conclure que les Juifs de Doura n'ont attaché aucune importance aux choix des sujets? C'est peu vraisemblable. Le sens commémoratif des carreaux à inscription et la valeur magique de l'œil ne leur a pas échappé. Il est probable que les Juifs de la Diaspora avaient su donner aux emblèmes un sens particulier, qu'il s'était créé pour les besoins de l'art un symbolisme juif. C'est ainsi que fut celui de la sortie d'Égypte (Exode, XIII, 4), les grappes de raisin le temps de l'entrée en Canaan (Nombres, XIII, 20 et 23-24). Les raisins, le froment, l'orge, les grenades sont parmi les produits de la prospérité d'Israël (Joël, I, 10-12). Sur des monnaies juives, on rencontre la grappe et les trois épis, et dans certains décors de fioles, d'inspiration juive, la grenade, le cédrat et encore les raisins. Une de ces bouteilles en verre moulé était exposée dans la salle judaïque du Louvre et deux autres ont été découvertes dans les ruines de Doura. Les fleurs épanouies ou en bouton, jointes aux cônes résineux pouvaient remémorer la prophétie d'Osée (XIV, 14, 5): "Je serai pour Israël comme la rosée, il fleurira comme le lis, il étendra ses racines comme les arbres du Liban". D'une façon générale, les fruits ou les animaux rappelaient la création: Les fruits, dit le Coran, sont un signe de Dieu (VI, 99) et, dans la Haggâdâ de Pâque, la liturgie juive répète: "Bénédiction à toi, Yahvé, qui as créé les fruits de la terre". Dans la Bible, Dieu est exalté par tous les végétaux, spécialement le cèdre, l'arbre qu'il a planté, et par tous les animaux, oiseaux, bouquetins, lions, poissons, jusqu'aux monstres (Psaumes, CIV, 16-26: Job, XLI, etc), qu'on pourrait reconnaître sur certains carreaux de la synagogue.
Comte du Mesnil du Buisson. Les Peintures de la Synagogue de Doura-Europos, 245-246 après J.-C., Roma, Pontificio Istituto Biblico. Piazza della Pilotta, 35. 1939.
Décor du plafond: fruits et fleurs
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