On constate l'inégalité de la répartition entre les quartiers. Le quartier Qanawāt avec la rue Taʿdīl et ses abords possèdent à eux seuls 30 branches du Qanawāt sur 91. Au contraire, les quartiers chrétiens et israélites n'ont que trois branches. Si l'on totalise les surfaces correspondant aux mesures, on trouve par exemple que le quartier Šaġūr reçoit un volume nettement supérieur à celui que l'on réserve pour les quartiers non musulmans de l'Est, bien que ceux-ci soient trois fois plus étendus.
On a voulu voir dans cette répartition la raison pour laquelle les musulmans ont relégué les chrétiens et les juifs à l'Est de la ville. Ne serait-on pas plus près de la vérité en retournant l'explication? Ne serait-ce pas en raison de la qualité de leurs habitants que ces quartiers ne reçoivent que peu d'eau? L'aqueduc de Qanawāt est de construction romaine, mais rien ne prouve que le mode de distribution actuel ait la même antiquité. Le manque de méthode que l'on observe dans le tracé des dérivations secondaires suffirait à le faire considérer comme postérieur à la conquête arabe. De plus, on connaît la date de construction de plusieurs bains et mosquées, ces faits indiquent que le tracé de nombreuses dérivations a été décidé ou remanié, soit à la période mamlūk, soit sous la domination ottomane.
Cette distribution est si désavantageuses pour les quartiers de l'Est, qu'une partie de Madnet aš-Šaḥm, occupée par des grecs orthodoxes, est entièrement privée de l'eau du Qanawāt alors que la pente du terrain ne s'oppose nullement à l'établissement de canalisations. Ces maisons possèdent des puits, mais n'ont pas d'eau courante.
Conduire l'eau aux bains et aux mosquées s'avère à Damas le but essentiel des dérivations du Barada. Sans doute leur nombre est tel qu'il est impossible qu'une tuyauterie de quartier ne desserve pas une mosquée ou un bain, mais de nombreuses dérivations furent spécialement tracées pour ces édifices: le Qanawāt, à lui seul, en compte 24.
Richard Thoumin. Géographie humaine de la Syrie centrale, Paris: Librairie Ernest Roux 1936 (texte: pp. 80-83).
René Tresse. L'irrigation dans la Ghouta de Damas. Revue des Études Islamiques 1929 (photo).
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