Les Croisés s'installent dans Antioche, ils se fortifient sur le littoral de la Méditerrainée, commandent les trouées qui conduisent vers l'Est, multiplient leurs châteaux dans les ʾAnṣārīya جبال الأنصاريّة. Apamée aux Francs, Sayjar شيزر aux Sarrasins, le district de Maṣyāf مصياف au Vieux de la montagne. A la saison sèche le Ġāb, praticable aux chevaux, offre une magnifique arène pour les coups de main, les rencontres et les surprises. Du donjon ďAbu Qubays أبو قبيس on signale aux défenseurs d'Apamée les cavaliers arabes sortant de Sayjar. A la suite du désastre de Ḥaṭṭīn حطّين (1187), Saladin entre dans Jérusalem. La résistance franque se concentre dans les Anṣārīya , d'Antioche à Tripoli. Le Ġāb borde la courtine montagneuse et en devient la défense avancée.
La lutte connut une nouvelle activité dans la seconde moitié du treizième siècle. Baybars, devant qui se replient les Mongols, retourne son armée contre les Francs, se rend maître d'Apamée et s'empare ďAntioche en 1267. Il attaque, sitôt après, les "Assassins" et impose sa volonté aux populations ʾAnṣārīya .
Plus rien ne restait de la prospérité qu'avait connue le Ġāb aux époques araméennes et grecques. Les fellahs, qui persévéraient à semer dans la plaine méridionale et à paître des troupeaux en bordure des marais, s'étaient fixés, pour la plupart, sur les hauteurs qui encadrent les basses terres. Plus que les ressources économiques de la région, la tradition, l'attachement au sol, la persistance du fait social retinrent les sédentaires. Les musulmans s'enfermèrent dans les forteresses, les chrétiens s'établirent sur le rebord du plateau. De l'autre côté du Ġāb, les nuṣaryris vivaient dans la montagne. Les villageois délaissaient la plaine. La misère et la désolation s'emparèrent du Ġāb. On savait à Alep et à Ḥama qu'on y péchait le silure, mais on ne portait nul intérêt à ces fellahs qui vivaient à la merci des Mawāli بدو الموالي et des nuṣaryris. Le Ġāb avait limité les terres de l'Empereur et celles du Calife, puis les Etats francs et les provinces sarrasines. L'insécurité détournait les caravanes, elles n'éprouvaient d'ailleurs plus le désir de se rendre à Antioche déchue, dont la vie ne cessait de se ralentir. Sous la domination ottomane, le Ghab, à demi oublié entre son double rempart montagneux, servit de limite entre le sunnisme et le nuṣaryrism.
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