Sunday, June 11, 2023

La fin de l'aventure chérifienne

 


Du côté chérifien, de la propagande verbale, on passe aux actes:


En décembre 1919, Faïçal décrète, sans nous prévenir, la conscription dans la région de Damas alors qu'aucun texte ne lui donne ce pouvoir.

En janvier 1920, il nous interdit l'utilisation de la voie ferrée Rayaq-Alep pour le transport des renforts et des ravitaillements à destination des garnisons françaises de Turquie. Nous sommes dans l'obligation de les acheminer par mer, avec embarquement à Beyrouth et débarquement à Alexandrette, ce qui demande quinze jours alors qu'il en aurait fallu quatre seulement par voie ferrée.

Un peu partout, en Syrie, Faïçal exploite contre nous le fanatisme musulman; nos partisans sont molestés, nos postes menacés, nos convois attaqués; les caravanes privées sont rançonnées, la vie économique du pays est suspendue, et l'émir, devant son œuvre, pensant que sa situation est solide, n'hésite pas à se faire proclamer roi de Syrie.

Le 7 mars 1920, le Congrès national syrien, réuni à Damas, lance la proclamation audacieuse que voici:

"En notre qualité de représentants réels de la nation arabe dans toutes les parties de la Syrie, nous avons déclaré l'indépendance de notre pays: la Syrie dans ses limites naturelles, la Palestine y comprise, sur la base civile et représentative. Nous avons choisi son Altesse Royale l'émir Faïçal, qui a combattu pour la liberté du pays, comme roi constitutionnel de la Syrie, sous le nom de Sa Majesté Faïçal Premier."

L'événement fait sensation à Paris; les Britanniques trouvent que leur protégé va tout de même un peu loin, et le gouvernement français veut en finir avec cette comédie.     

Les Alliés, réunis à San Remo, décident, le 25 avril 1920, d'attribuer à la France le mandat sur le Liban et la Syrie, et à la Grande-Bretagne celui sur la Palestine et la Mésopotamie. 

Mais cela n'est pas du goût de Faïçal qui, toujours mal conseillé, refuse de reconnaître le traité. Alors, les choses se gâtent; le général Gouraud, haut commissaire à Beyrouth, adresse au roi de Syrie, le 14 juillet 1920, l'ultimatum que voici résumé: 

Reconnaissance du mandat de la France sur la Syrie; 
Liberté pour les français d'utiliser la voie ferrée Rayaq-Alep;
Occupation par les troupes françaises de la ville d'Alep;
Châtiment des coupables d'attentats sur les postes et détachements français. 


Mariano Goybet

L'émir sent, cette fois, que ça marche mal pour lui; il ergote sur certaines clauses de l'ultimatum et cherche à gagner du temps; mais, le 20 juillet, le général Gouraud  fait marcher sur Damas une colonne commandée par le général Goybet.  


La force française rencontre les troupes chérifiennes à Meyssaloun; la bataille s'engage le 24 juillet, elle dure huit heures et s'achève par la déroute et la fuite des Chérifiens qui laissent entre nos mains quinze canons et quarante mitrailleuses. Le 25 juillet, les troupes françaises entrent à Damas et proclament la déchéance du roi Faïçal.

L'aventure chérifienne a vécu. 







Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937. 

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