Monday, June 26, 2023

Mort de Salīm Pāša al-ʾAṭraš

 


 L'émir Salīm Pāša s'éteint le 15 septembre 1923. Très honnête homme, ce cheikh druze aimait la France; il l'a servi autant qu'il a pu en des temps difficiles et contre tout un clan de sa famille inféodé aux Chérifiens. Il a fait voter son peuple pour le mandat français alors qu'une formidable campagne était montée en faveur d'une autre puissance. Il a loyalement collaboré avec nos officiers de renseignements pour créer de toutes pièces, au Jabal, une administration qui n'existait pas auparavant, et travaillé activement et avec intelligence pour que l'État naissant du Jabal ad-Durūz prenne corps. Si ses efforts n'avaient été contrariés par des féodaux jaloux de ses fonctions de gouverneur, la tranquillité serait revenue au Jabal et, avec elle, la prospérité dans les foyers. 


ʿAbdul Ġaffār Pāša, qui a tant combattu l'émir défunt, croit le moment venu, pour la Maison de Soueida dont il est le chef, d'accaparer titre et fonctions devenus vacants par le décès du gouverneur. Il se met en campagne pour rallier à son point de vue le plus grand nombre de ses parents; mais chacun sait qu'ʿAbdul Ġaffār travaille surtout pour lui; or, il n'est pas aimé dans sa famille, parce que ambitieux et égoïste. Aussi, au cours d'une réunion organisée en vue de désigner le successeur de l'émir Salīm, les ʾAṭraš, plus divisés que jamais, se séparent sans avoir rien décidé. 

Pour trancher le différend, on fait appel à une juridiction supérieure, le Majlis, chambre élue au suffrage du peuple, composée de délégués de toutes les familles, petites et grandes, et non pas seulement de la seule ʾAṭraš. Plusieurs longues séances, remplies par des discussions interminables, augmentent encore le désaccord; l'entente ne se fait pas et on s'arrête à un compromis; celui de solliciter du Haut Commissaire la nomination d'un officier français pour gouverner le Jabal, en attendant que l'accord se fasse entre les cheikhs druzes, sur la désignation du nouveau chef d'État.

Le Haut Commissaire accepte la suggestion du Majlis et le capitaine Carbillet est nommé gouverneur du Jabal. Très au courant des choses indigènes, ayant le sens de l'administration, actif, énergique, cet officier se met à l'œuvre dès son arrivée à Soueida. Grand travailleur et réalisateur intelligent, il en impose bientôt à tous, aux cheikhs comme aux paysans, dans ce pays où ordinairement tout se passe en palabres. 

Pendant ce temps, nos ennemis en Transjordanie ne restaient pas les bras croisés; Riḍa Pāša ar-Rikābi, ancien ministre de Fayṣal à Damas, et aujourd'hui, premier ministre du roi ʿAbdalla, triomphe. Membre influent du comité syro-palestinien du Caire, le personnage saisit l'occasion du mécontentement général qui sévit au Jabal pour engager son ami Sulṭān al-ʾAṭraš à soulever le peuple et venger l'honneur druze.










Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937. 

No comments:

Post a Comment