Le frère de Fayṣal, l'émir ʿAbdullāh, roi de Transjordanie (1), sous mandat anglais, rêve d'agrandir son royaume par l'incorporation, à ses États, de tout ou partie du Jabal ad-Durūz. Il use de tous les moyens pour convaincre les Druzes qu'il est de leur intérêt de demander le rattachement de leur pays à la Transjordanie.
Le gouverneur du Jabal, Salīm Pāša, honnête homme et francophile, s'emploie de son mieux à contrecarrer cette propagande; mais il est desservi, dans sa propre famille, par quelques-uns de ses parents, jaloux du titre d'émir conféré au gouverneur par le haut commissaire français. On voit reparaître ici la rivalité née dans la Maison ʾAṭraš, entre les fils aînés et les cadets, à l'époque de la succession du grand-père ʾIsmāʾīl. Salīm Pāša appartient à la branche cadette (2) qui s'appuie sur la France; ses rivaux, les aînés, penchent vers l'Angleterre et écoutent volontiers les intrigues de la Cour de Transjordanie, la majorité du peuple druze se prononce pour le mandat français.
Le roi ʿAbdullāh ne se tient pas pour battu; ce qu'il n'a pu obtenir par la persuasion, il pense l'avoir par l'intimidation, et alors il devient grotesque. Il donne mission à un cheikh ʾAṭraš, ʾAsad أسد Bey (?!), cousin de Sulṭān - qui, pour la circonstance, revêt un uniforme de général chérifien et se fait accompagner par une brillante escorte de cavaliers - de se rendre à Soueida et de s'emparer du pouvoir au nom du roi de Transjordanie.
La comédie est par trop burlesque; le naïf général chérifien, après une orgueilleuse entrée à Soueida, prend la fuite avec ses cavaliers, dès qu'il apprend qu'une colonne française marche sur le Jabal. Nos soldats entrent peu après dans la capitale, où ils sont reçus avec enthousiasme par la population.
(1) ʿAbdullāh est nommé émir de transjordanie en 1922. Il sera proclamé roi en 1946, bien des années après la rébellion syrienne en question.
Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937.
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