En 1930, le vice-roi d'Égypte, Muḥammad ʿAli, dont la suzeraineté sur la Syrie a été reconnue par Constantinople, a besoin d'une armée pour mettre à la raison Druzes et Maronites du Liban qui, après avoir vécu en bonne harmonie pendant des siècles, se font une guerre acharnée depuis une trentaine d'années. Des contingents de soldats sont demandés par les Égyptiens, à toutes les régions et à toutes les confessions syriennes; mais les Druzes du Jabal refusent de fournir le leur et se réfugient dans le Lajāt, où ils se savent à l'abri des représailles de leurs maîtres.
Une expédition égyptienne est envoyée contre eux; elle commet l'imprudence de s'engager dans ce difficile pays. Ses troupes sont harcelées par les guerriers druzes, embusqués dans les rochers, cachés dans les cavernes, toujours invisibles et insaisissables. Subissant des pertes considérables, les Égyptiens, démoralisés, se retirent.
Mais Muḥammad ʿAli ne se tient pas pour battu; en 1833, il fait partir une nouvelle expédition vers le Jabal; les troupes, cette fois, ne pénètrent pas dans le Lajāt, elles en gardent les issues extérieures pour rendre impossible le ravitaillement des assiégés qu'elles pensent réduire par la famine. Mais quelque bonne garde que l'on fasse, des isolés peuvent toujours se faufiler au dehors pendant la nuit; et, en effet, quelques Druzes quittent le Lajāt et vont mettre leurs frères Libanais au courant de ce qui se passe au Jabal.
Des pourparlers s'engagent avec les Égyptiens, mais ceux-ci se rappelant leur défaite d'il y a trois ans, et se croyant vainqueurs aujourd'hui, exigent la reddition pure et simple des rebelles, avec remise totale de leurs armes. Conditions inacceptables pour les guerriers montagnard; les palabres sont rompus et les Druzes du Liban, faisant cause commune avec ceux du Lajāt, se soulèvent, s'emparent sans coup férir de la citadelle de Rāṣayya et assiègent Ḥāṣbayya. Les Égyptiens ne pouvant faire face aux deux soulèvements à la fois se retirent du Lajāt et c'est alors le triomphe pour les Druzes.
Cette tactique de mutuel appui des groupements druzes entre eux, se renouvellera contre nous en 1925. Lorsque nos troupes opéreront au Jabal, les Druzes libanais, prenant fait et cause pour leurs frères de la montagne, se soulèveront et assiégerons, dans la citadelle de Rāṣayya, deux escadrons de spahis y tenant garnison, espérant, par cette diversion, nous faire évacuer le Jabal, considéré, par tous les groupements druzes, comme la forteresse gardienne de leur religion. Mais nos effectifs nous permettront de mener victorieusement les combats sur les deux théâtres et la rébellion sera jugulée au Liban comme au Jabal.
Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937.
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