Sunday, June 25, 2023

Coup de théâtre pendant la fête de l'indépendance

 


 Le 5 août 1923, la population de Soueida fête joyeusement l'anniversaire de l'indépendance de l'État Druze; des réceptions officielles sont organisées et le délégué du haut commissaire à Damas vient les présider. Des cheikhs, un grand nombre de chefs des villages, des masses de paysans, accourent vers la capitale, dont la population se trouve doublée ce jour-là. Les officiers français multiplient les amusements et les attractions pour que cette manifestation fasse époque au Jabal et montre au Druzes que la France est bien avec eux. La fête est très réussie et la satisfaction générale, lorsqu'au milieu des réceptions officielles, le délégué du haut commissaire, entouré des officiers français, voit s'avancer vers lui Sulṭān al-ʾAṭraš que l'on croyait en Transjordanie. Le personnage a pu arriver jusqu'à la capitale sans que notre service de renseignements en ait rien su - complicité tacite des populations contre laquelle nous resterons toujours désarmés. 


Sulṭān salue notre représentant et lui demande l'ʾamān (la sécurité de sa personne) pour l'affaire d'ʾAṣlaḥa الأصلحة qui a coûté la vie au lieutenant Bouxin. 

Le délégué français accorde le pardon sollicité; nous ne la blâmons pas; en politique coloniale, il faut parfois mettre une sourdine à l'amour-propre quand de plus hauts problèmes sont en jeu et, aujourd'hui, c'est précisément le cas pour le Jabal. Toutefois, dans l'esprit de beaucoup, cette mesure de clémence ne servira de rien; elle va, au contraire, augmenter le prestige de Sulṭān et permettre à ce féodal criminel, vendu aux étrangers, de donner libre cours à sa propagande anti-française au milieux des Druzes.










Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937. 

No comments:

Post a Comment