Sunday, January 22, 2023

Élie ressuscitant le fils de la veuve: description

 


 Le peintre a traité le sujet de la façon suivante: à gauche, la veuve, le visage de profil (1), se tourne vers la droite tendant son enfant mort vers le prophète. L'enfant nu, le bras gauche et la tête pendante, de même que le mouvement de cette grosse femme, sont d'un rendu intéressant. Le voile et la jupe brun violacé, et (à ce qu'il semble) la nudité de la poitrine paraissent des signes de deuil. Il en est de même des trois incisions que nous croyons discerner sur le sein droit; de telles pratiques étaient cependant interdites en Israël (Deutéronome, XIV, 1; Lévitique, XIX, 28). Le costume de deuil se retrouve dans les tableaux 24 et 29.


Au milieu du tableau, Élie est assis sur le lit, la jambe gauche repliée sous lui. Le cadre du lit est soutenu par des pieds en forme de lion assis sur des socles. Le matelas épais est recouvert d'une belle étoffe verte à fleurons et bandes noires et mauves. Sous le lit, un escabeau est rangé comme de coutume. Élie a le costume grec, amplement drapé, de couleur blanche comme l'est généralement la robe des prophètes dans la synagogue. Les bandes et les clavi sont mauves. Le prophète tient dans ses mains l'enfant déjà ressuscité et étendant les bras; il semble le montrer. Des draperies blanches bordées de mauve sont suspendues au-dessus d'Élie; en haut et à droite, la main de Dieu est représentée grande ouverte, comme de coutume, figurant l'intervention de Yahvé, parlant au prophète. Il n'est pas impossible en outre que le peintre ait pensé à l'expression du premier Livre des Rois, XVIII, 46: "La main du Seigneur s’empara du prophète", quoique ce texte soit appliqué au prophète après sa victoire du Carmel. 

A la droite du tableau, la veuve rend grâce à Élie. Représentée de face, étendant la main droite vers le prophète, elle porte l'enfant sur son bras gauche. Elle a quitté ses habits de deuil; sa robe est blanche; sa jupe et son voile sont jaunes. L'enfant est vêtu d'une robe rose mauve. Ce changement de costume est fait très certainement pour opposer le deuil à la joie. Cette figure féminine parfaitement calme s'oppose à l'image douloureuse et angoissée peinte en symétrie. La représentation de cette mère heureuse, portant son enfant sur son bras, est importante pour l'histoire de l'art, car elle constitue un prototype nouveau du grand sujet de la Vierge et l'Enfant




(1) Les personnages de profil sont rares dans les peintures de la synagogue. 





Comte du Mesnil du Buisson. Les Peintures de la Synagogue de Doura-Europos, 245-246 après J.-C., Roma, Pontificio Istituto Biblico. Piazza della Pilotta, 35.  1939.

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