3 juillet 1926.
Al-Ḥarīsa الحريسة appartient au cheikh Ḥamza Darwīš, lequel s'est soumis par lettre le 19 juin dernier; il est surprenant qu'il ne soit pas là aujourd'hui; son fils nous reçoit dans la maison paternelle, mais ne dit mot sur le père, malgré les demandes qui lui sont faites.
On apprend par un partisan que le cheikh, blessé à la jambe dans un combat, est réfugié dans une grotte à deux kilomètres du village. Puisqu'il n'est pas resté chez lui, c'est que sa soumission n'était que feinte; un détachement de cavalerie se prépare donc à aller le cueillir dans sa grotte. Spahis et partisans sont à cheval et vont partir, lorsque le cheikh, claudiquant d'une jambe, débouche d'une petite rue, se présente au général et déclare s'en remettre "à la justice, à la clémence et à la générosité de la France".
L'événement est d'importance, car Ḥamza Darwīš est l'un des cheikhs les plus écoutés du Jabal; il possède quatre villages et son prestige est grand, en raison de son intelligence, de sa connaissance des affaires publiques et de son courage légendaire chez les Druzes. Dévoué à la cause française avant l'insurrection, ayant la confiance du gouverneur Carbillet, il est cependant passé à la rébellion un des premiers et n'a quitte Sulṭān qu'après sa blessure; il a été pour lui son meilleur lieutenant et son conseiller le plus écouté.
Témoin des tractations des cheikhs druzes avec les étrangers soutenant la révolte, il sait beaucoup de choses, et sans plus tarder d'ailleurs, afin de prouver qu'il est de bonne foi dans sa soumission, il fait spontanément les déclarations nettes et precises que voici:
"Beaucoup d'argent arrive au Jabal, de Transjordanie, de Palestine, du Caire, des Indes, de l'Amérique et même de certaines grandes villes de Syrie, comme Damas, Alep, Ḥimṣ et Ḥama. Avec cet argent, on paye les rebelles enrôlés dans les bandes et on aide leurs familles, mais la plus grosse part est partagée entre Sulṭān, Šahbandar, Rašīd Ṭalīʿ et quelques autres féodaux. Le partage ne se fait pas toujours sans récrimination; il est une source de discussions et de division parmi les chefs insurgés; c'est ansi qu'il n'y a pas longtemps, ʿAbdul-Ġaffār Pāša, mécontent, a menacé de faire sa soumission et d'abandonner la cause révolutionnaire."
Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937.
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