Thursday, September 28, 2023

Ṭarba

 


6 Septembre 1926. 


Ṭarba طربا est complètement évacué; les villageois ont assassiné, en mai dernier, deux aviateurs ayant atterri non loin des maisons par suite du mauvais fonctionnement de leur appareil. Dès que le fait fut connu à Soueida, avis était envoyé au chef du village d'avoir à remettre les assassins sous peine de sanctions sévères contre le village; il ne fut jamais répondu à cette injonction. 

Aujourd'hui les débris de l'appareil gisent à deux cents mètres des maisons et nous nous trouvons en face d'un village abandonné; des recherches sont faites pour retrouver les corps des malheureux aviateurs. Nous avons dans la colonne le cheikh Ḥamza Darwīš, celui-là même qui s'est soumis à al-Huwayya الهويّا dans les circonstances relatées précédemment. Au courant de la tragédie qui s'est déroulée à Ṭarba, Ḥamza se rend au village de Ronach (?!) , à cinq kilomètres d'ici, pour se renseigner sur le lieu de sépulture de nos infortunés compatriotes. Il en revient avec un berger qui nous conduit à un arbre - le seul existant dans la région - au pied duquel est un tombeau recouvert de dalles de pierre. 

Ces dernières enlevées, on aperçoit à l'intérieur les deux corps momifiés, mais très reconnaissables, des sous-officiers aviateurs. On a confectionné des cercueils de fortune, avant d'exhumer les corps pour les transporter à Soueida, où les aviateurs seront inhumés au cimetière militaire, à côté de ceux qui y dorment déjà.       

Les coupables ont lâchement abandonné leur village à l'approche de la colonne; on ne les retrouvera peut-être jamais, mais le crime ne peut rester impuni. Nous avons, on s'en souvient, respecté les bien du jeune cheikh d'Imtān امتان, ʿAli bey, en reconnaissance de la protection qu'il avait donnée à deux aviateurs ayant atterri à côté de son village, comme l'ont fait, ici, les deux infortunés dont nous venons de retrouver les corps. Mais nous ne saurions partir de Ṭarba sans avoir témoigné notre réprobation pour la lâcheté et la cruauté dont se sont rendus coupables ses habitants. En conséquence, les maisons des cheikhs sont détruites et un écriteau, flétrissant la sauvagerie des maîtres du lieu, est placé en bonne vue, pour que les passants puissent le lire et le méditer.












Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937.

No comments:

Post a Comment