Comme nous 'avons vu précédemment, le 6 juillet 1926, le chef de la religion druze au Jabal, ʾAḥmad al-Hijri, venait à Soueida, en ambassadeur des chefs insurgés, soit-disant pour prendre connaissance des conditions de soumission, mais plutôt, selon nous, pour sonder nos intentions quant au sort réservé à certains personnages de l'insurrection. En s'en allant, le cheikh assurait le commandant de garnison qu'une fois sa mission remplie il reviendrait se soumettre.
Pendant un bon mois nous n'avons plus entendu parler de lui, lorsque aujourd'hui 13 août ʾAḥmad al-Hijri se présente à Šahba. Il déclare se désolidariser des chefs de la révolution, lesquels, dit-il, pensent surtout à remplir leurs poches avec l'argent destiné à soulager la misère du peuple druze. Il fait sa soumission, très sincèrement, affirme-t-il, et offre de s'employer, comme ses trois collègues déjà soumis, à ramener la paix au Jabal.
Depuis sa visite à Soueida, il a vu plusieurs fois Sulṭan, Šahbandar, Rašīd Ṭalīʿ et ʿIzz ad-Dīn al-Ḥalabi, et cru un moment pouvoir les amener à une meilleure compréhension des intérêts du peuple druze; mais aujourd'hui, mieux fixé sur leur mentalité et leur cupidité, il est persuadé qu'ils continuent à agiter le pays, aussi longtemps qu'ils recevront de l'argent de l'extérieur; ʾAḥmad al-Hijri ne peut approuver une telle conduite, aussi se sépare-t--il d'eux et se soumet-il sans condition.
Cette soumission du chef de la religion druze, s'ajoutant à celle des autres cheikhs religieux, aura sans doute une grosse répercussion au Jabal, mais il faut aussi considérer que leur influence est aujourd'hui moins puissante qu'avant l'insurrection. Cependant, la considération et le respect dont la population de Šahba entoure ʾAḥmad al-Hijri, dès son arrivée, donnent à penser que d'avoir avec nous les quatre chefs religieux est un appoint moral non négligeable, pouvant hâter le retour au calme.
Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937.
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