Après le désastre des Égyptiens nous devions voir les Israélites débouchant triomphalement sur la rive orientale, du milieu des eaux refoulées par Yahvé. L'artiste ne nous a pas épargné ce contraste, et il s'est inspiré de la suite même du récit de l'Exode, (XIV, 29-30): "Les Israélites s'étaient avancés à pied sec au milieu de la mer, et les eaux avaient formé une muraille à leur droite et à leur gauche. En ce jour-là.... ils virent les cadavres des Égyptiens sur le rivage de la mer".
Moïse s'avance de face avec une belle expression un peu mélancolique; il est amplement drapé dans le costume que nous lui connaissons. Sur le côté droit de Moïse et en arrière, le peuple débouche de la mer. Plus d'émigrants craintifs ici, mais seulement une troupe de soldats avec les douze chefs que nous avons vu tout à l'heure. Leurs costumes et leur attitude sont les mêmes, mais ici chacun porte une bannière. Quant aux soldats, ils sont peints avec plus de détails et de variété. Les casques sont de diverses couleurs: noirs, jaunes, orangé, mauves, blanc crème. Les cottes de mailles sont violacées, souvent avec un bord rouge en bas; les jambières, orangées ou grises; les boucliers, soit rouge à bord mauve, soit jaunes ou bleus.
L'artiste a combiné ici deux scènes, la sortie de la mer et le miracle de Mâra, raconté à la suite dans le récit de l'Exode (XV, 22-25). Après le passage de la mer Rouge, les Israélites marchèrent trois jours dans le désert sans pouvoir trouver d'eau. Puis ils atteignirent Mâra - nom qui veut dire amertume -; ils n'en purent boire les eaux, car elles étaient amères. Alors Moïse cria vers Yahvé et Yahvé lui indiqua un bois qu'il jeta dans les eaux, et les eaux devinrent douces.
Le peintre a représenté sous les pieds du peuple en marche, soit au premier plan, "une petite mare" qui est sans rapport avec la mer Rouge. Une quantité de poissons verts et rouges paraissent sauter hors de l'eau comme pour montrer qu'un prodige s'y accomplit. Moïse jette dans cette eau un bâton qu'il tenait dans sa main. Le geste est très clairement indiqué par le peintre et l'épisode de Mâra est bien reconnaissable. C'est là, semble-t-il, que le peuple, enfin désaltéré, fut rangé en ordre de marche. L'artiste a exprimé sans doute cette idée en affectant un étendard à chacun des chefs des tribus.
Ce grand tableau, dont le style est continu, lié ou enchainé, est l'un des plus complexes de la synagogue.
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