En signe de fête, les boutiques sont fermées, mais devant leurs boutiques, les boutiquiers tiennent salon de réception. Ils ont sorti des fauteuils et des canapés en peluche cerise et pistache, icrustés de nacre, meubles de la dernière civilisation autour d'une maigre table en marqueterie - autre article du jour - chargée de fleurs artificielles, de vases de Chine anciens ou d'une rangée de lampes allumées.
On s'intalle, on égrègne son chapelet, on fume un narguilé, on croque des douceurs pour sauter sur ses pieds à chaque nouvel arrivant et recommencer la kyrielle des galanteries damascènes.
Peu de drapeaux dans cette fête. Nous ne le regrettons pas. Il est affreux, le nouveau drapeau syrien: un grand champ bleu pâle, blanchi par le premier soleil, avec, relégué dans un angle, un minuscule pavillon français, et, arrondie au centre, une grosse tache, la pleine, chargée de concilier le croissant et la croix.
Au reste, seuls les marchands chrétiens l'ont arboré. Eux aussi sont en liesse "par sympathie" pour leurs collègues musulmans. Les musulmans, quant à leur tour, fêteront le Noël bethléhémitaine "Par sympathie". Il ya a ainsi beaucoup de chômage sympathique à Damas.
Myriam Harry. Damas, jardin de l'Islam. J. Ferenczi & Fils 1948.
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