Au galop à la Sulṭānīyā, l'ancien lycée turc, fondé par ʿAbdel-Ḥamīd....
Notre rôle ici, continue le recteur, fut donc double. Traduire d'abord les matières de l'enseignement turc en arabe, ensuite éveiller la conscience patriotique....Au reste, notre langue, considérée, je crois, par vous, comme langue agonisante, sinon barbare, est miraculeusement vivante et si souple et si riche qu'elle s'adapte aux formes les plus modernes de la pensée et à toutes les évolutions du progrès.
Ah! cette culture moderne, cette illusion de notre progrès, quelle place elle accapare dans les conservations!
- N'est-ce pas, ma classe peut se comparer à une classe d'Europe? demandent, avec une touchante et inquiète fierté, les professeurs.
On ne me fait grâce de rien. Ni de la salle de gymnastique où l'on entraîne les lycéens au service militaire, ni de celle du dessin, où l'on enseigne la topographie et la cartographie, ni du laboratoire de chimie, ni même des dortoirs... On soulève les couvertures, on me signale l'épaisseur du matelas, l'ordre des armoires, on me montre tout, excepté ce que je regarde par les fenêtres: une cour d'orangers, si criblés d'oranges qu'on dirait des torches allumées dont l'enivrante suavité monte jusqu'à moi.
- N'est-ce pas que notre internat vaut un internat de France?
- Oh! mieux! beaucoup mieux, dis-je en enviant les collégiens qui dorment dans la griserie des orangers.
Descente au réfectoire et aux cuisines. Que je savoure l'odeur de la vraie cuisine arabe, safran et beurre fondu! Dans une marmite, je trempe mon doigt:
- Délicieux!
Et tous de rire -cuisiniers compris- comme de petites folles.
- Vous verrez, nous ne nous asseyons pas par terre, et nous ne mangeons pas avec nos doigts.
- Je regrette, je trouverais cela charmant.
On rit encore, mais moins sincèrement, s'imaginant une ironie, et un professeur me dit avec amertume:
- Oh, de nous, on n'aime en France que notre ignorance, nos haillons et nos ruines. Quand donc voudriez-vous nous compter parmi les peuples civilisés?
Mais le recteur voulant effacer ce malentendu, et ayant consulté ses collègues:
Eh bien, si vous daignez rester avec nous, nous déjeunerons les jambes croisées autour du plat.
Je comprends l'héroïsme d'une pareille concession et en suis vivement touchée.
- Hélas! mon emploi du temps ne me permet pas d'accepter.
Myriam Harry. Damas, jardin de l'Islam. J. Ferenczi & Fils 1948.
Stefan Weber. Damascus: Ottoman Modernity and Urban Transformation (1808-1918). Proceedings of the Danish Institute in Damascus 2009 (photo).
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