L'aménagement de cette vaste oasis rendra les alentours de la vallée éminemment propres au peuplement humain, mais il favorisera aussi la propagation de deux maladies redoutables: la fièvre typhoïde et la malaria, dont les germes pulluleront désormais dans les innombrables flaques formées par l'eau servant à l'irrigation des jardins.
Ce n'est pas le seul inconvénient du site: le relief n'offre aucun obstacle sérieux qui puisse arrêter la marche d'un assaillant; en outre, la manière dont se développera Damas - pour logique qu'elle soit par ailleurs - permettra de couper aisément l'eau potable à la majeure partie de la population.
Il faut souligner aussi le manque de pierre à bâtir: la ville, assise sur les nappes de cailloutis apportées par le fleuve, ne disposera guère comme matériaux de constructions que de l'argile du sol et des troncs de peupliers de la vallée, matériaux également fragiles et peu esthétiques.
Plus grave est la difficulté des communications entre la ville et la mer. Pour franchir la double barrière montagneuse du Liban et de l'Anti-Liban, il faut utiliser soit des cols élevés, enneigés chaque hiver, soit des vallées profondément encaissées: routes dures en tout temps, et pour ainsi dire impraticables une partie de l'année. Vers le Nord, l'Est et le Sud, seules directions largement ouvertes, les coulées basaltiques par endroits et partout le manque d'eau et la perpétuelle menace des pillards nomades ne sont guère favorables à un trafic intense. Dans ces conditions, on est obligé d'admettre que si Damas est devenue un centre commercial, elle le doit moins à une situation géographique privilégiée qu'à sa double qualité de marché d'une riche région agricole et de grande cité industrielle: à l'inverse de ce qui s'est passé ailleurs, c'est la grandeur de la ville qui a favorisé le développement du trafic.
Du fait de cette absence d'accès facile vers la mer, la destinée de Damas sera toujours liée davantage à l'Orient qu'à la Méditerranée.
Jean Sauvaget. Esquisse d'une histoire de la ville de Damas. Revue des Études islamiques, 1934, p. 422-480.
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