Wednesday, December 28, 2022

Tableau 19: interprétation


 L'identification de cette grande figure n'est pas aisée. On a proposé d'y reconnaître Moïse, Samuel, Jérémie, Esdras. Il nous semble aujourd'hui que cette dernière identification est la plus vraisemblable. Néhémie (VIII, 1-8) décrit en effet comment Esdras, prêtre et scribe, au retour de l'Exil, apporta solennellement sur la place publique le livre de la loi de Moïse et en donna lecture à toute l'assemblée d'Israël. Esdras se tenait debout sur une estrade, il ouvrit le livre en vue de tout le peuple et fit la lecture de la Loi que des lévites expliquèrent ensuite. Cette cérémonie eut lieu à la première fête des Tabernacles après le retour de l'exil, et la lecture fut faite pendant les huits jours que dura la solennité. 


Cette lecture nous est présentée véritablement comme la fondation d'une liturgie et elle coïncide avec le renouvellement de l'alliance avec Dieu, qui fut scellée par les chefs israélites. Esdras est considéré comme le fondateur des synagogues, et, d'après le Coran (IX, 30), comme "fils de Dieu". 

Le grand rouleau dans la peinture serait donc, on le devine aisément, le rouleau de la Tôrâh dont la lecture se fait encore publiquement dans la synagogue. Le texte en aurait été révélé miraculeusement à Esdras (Liv. IV, apocr., XIV)

Le coffre à rouleaux aux pieds d'Esdras pourrait signifier qu'il était scribe et auteur d'écrits bibliques. Mais nous croyons qu'en outre cette boîte monumentale, contenant sans doute les rouleaux de la Tôrâh, doit être considérée comme le prototype de l'ârôn haqqôdesh, l'armoire de la Loi dans la synagogue. Le peintre pour accentuer l'allusion a donné à la boîte la même forme arrondie du haut, comme il l'a donnée aussi à l'arche d'alliance dans les tableaux voisins, l'arche devant aussi être considérée comme le prototype de l'ârôn haqqôdesh. Pour éviter cependant toute confusion entre la boîte d'Esdras et l'arche, qui disparut, on le sait, au temps de Jérémie (II Macchabées, II, 4-8), l'artiste a représenté la boîte en blanc, l'arche plaquée d'or étant toujours peinte en jaune. 

Quant au voile rouge qui recouvre la boîte, il est destiné sans doute à marquer la sainteté de l'objet, comparé à l'arche elle-même. On sait en effet que, lorsqu'on transportait l'arche, on la recouvrait d'un drap de pourpre écarlate comme tous les objets sacrés du Tabernacle (Nombres, IV, 5-7, 9, 11-14). On a vu déjà que le peintre du registre II excellait dans les assimilations entre le passé glorieux d'Israël et l'état contemporain de la synagogue.




Comte du Mesnil du Buisson. Les Peintures de la Synagogue de Doura-Europos, 245-246 après J.-C., Roma, Pontificio Istituto Biblico. Piazza della Pilotta, 35.  1939.


Tableau 19: description

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