Friday, July 14, 2023

Édouard Andréa au commandement de la région de Damas

 


 Nommé au commandement de la région de Damas et arrivé avec les renforts de troupes, le colonel  Andréa complète le service des barrages, pendant la nuit, par des patrouilles de policiers et de gendarmes chargées de visiter les quartiers suspects et d'arrêter tout individu rencontré, interdiction ayant été faite de circuler dans les rues après neuf heures du soir. 


Ainsi comprise, la défense intérieure de la ville est de nature à empêcher toute tentative d'émeute; mais il faut faire davantage; aller à la source du mal et surveiller la propagande extrémiste, chose délicate, car des personnalités influentes peuvent être mises en cause, et elles ne doivent l'être qu'à bon escient. Des dossiers, établis par le commissaire de police français, en fonction à Damas depuis plusieurs années et connaissant bien, par conséquent, les faits et gestes des Damascains, permettent de voir clair dans les intrigues de ces derniers. Les plus compromis sont convoqués chez le colonel gouverneur où ils reçoivent des conseils de modération. Les journalistes sont prévenus que leurs feuilles pourront être interdites, pendant plus ou moins longtemps, lorsqu'elles publieront des articles de nature à troubler l'ordre. Il est recommandé aux rédacteurs de soumettre leurs pages, avant leur insertion, au bureau militaire de la presse, où ils recevront toujours bon accueil et où ils pourront prendre connaissance, dans leur exactitude absolue, des nouvelles et des événements survenus. Nous devons à la vérité de dire qu'aucun d'eux n'a manifesté de mauvais vouloir et qu' après cette première prise de contact avec le gouverneur, les journaux de Damas n'ont plus publié d'articles à tendance subversive.       

Mais, à côté des membres de la presse et des personnalités agissant en sourdine, il y a une catégorie de gens moins faciles à convaincre; ce sont les agitateurs violents qui pérorent dans les quartiers populaires, haranguent les foules, critiquent les décisions du haut commissariat français et calomnient les fonctionnaires syriens, conseillés par nos délégués. Ce sont les vrais facteurs de troubles, les plus dangereux, en tout cas, parce qu'ils ont une action directe sur le peuple qu'ils fanatisent. Ils sont irréductibles parce que grassement payés pour faire leur vilaine besogne; les convoquer et essayer de leur faire entendre raison ne servirait à rien; et, cependant, il faut les empêcher de nuire. 

La ville se trouvant en état de siège et les personnes en question pouvant être considérés comme troublant l'ordre public, le commissaire de police reçoit l'ordre de les arrêter et de les conduire, non pas en prison, mais en résidence forcée dans une villa confortable réquisitionnée à cet effet. Là, ces agitateurs ont toute liberté pour recevoir leur famille et leurs amis; mais il leur est interdit de sortir en ville; l'essentiel, en effet, étant de les tenir éloignés d'une populace turbulente facile à égarer.        

Enfin un étroit contact est gardé avec les chefs des grandes familles damascaines et les hauts fonctionnaires indigènes, par le délégué du haut commissaire, M. Pierre Alype, dont la courtoisie et la grande compréhension du monde arabe, chauffé à blanc par la propagande chérifienne, lui attirent la confiance des personnalités les plus en vue et contribuent largement à apaiser les esprits dans las hautes sphères musulmanes.










Édouard Andréa. La Révolte druze et l'insurrection de Damas, 1925-1926. Payot, Paris 106 Boulevard St. Germain, 1937. 

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